Rituals, ft. Leia

rituals

☾ ☾ ☾ In restless dreams I walked alone Narrow streets of cobblestone 'Neath the halo of a street lamp I turned my collar to the cold and damp When my eyes were stabbed by the flash of a neon light That split the night And touched the sound of silence

La solitude pour Leia est quelque chose de particulier. Elle la déteste autant qu'elle l'aime. Sans savoir si elle était réellement si seule avant tout ça, elle sait qu'aujourd'hui, sans sa solitude, elle ne serait plus parmi les vivants. Son cerveau, son meilleur allié est devenu son pire cauchemar. À la seconde où elle devient un peu inattentive, des bribes de souvenirs traversent ses veines pour un peu plus la détruire. C'est pas devenir un zombie, qui fait peur à la belle, c'est en être déjà un, en phase de décomposition, sans avoir jamais aucune solution. Le remède, bancal et peu sûr, c'est de s'occuper avec des choses futiles. Divertir le crâne pour lui faire oublier de frapper, encore et encore. Lui faire oublier ce qu'il a un jour été.

Destiny a cette saveur un peu douce-amère, cette saveur qui semble aussi tendre que violente. Parce que tout le monde est abîmé, bousillé, mais tout le monde rêve d'essayer, au moins d'un peu avancer. Le monde vit entre les souffles coupés, retrouve une routine terrifiante mais méritée. Une routine qui laisse l'occasion de respirer. Souvent silencieuse, la brunette passe son temps à observer et écouter ceux qui passent devant son bureau, captant des morceaux d'informations qu'elle oublie souvent tout aussi vite. Un, pourtant, avait traversé un peu plus que les autres. Jusqu'à ce petit tilt que l'on ressent au fond de la tête. Une demoiselle, assez jeune, s'occupait de raconter des histoires aux enfants, et à ceux qui voulaient le redevenir aussi. Il a fallu quelques jours à Wayne pour retrouver le petit groupe, en retrait, blottie dans l'ombre alors qu'elle n'a pas envie d'être remarquée. Sa longue chevelure brune se fondant parfaitement dans les ténèbres, personne n'a fait attention à elle. La voix de la conteuse, elle, traversait tant la lumière que les nuages, capable de faire vivre des images sous les yeux des plus attentifs.

Pourtant, quelque chose frappait Leia. Quelque chose qui d'un coup, d'un seul, l'a affreusement peinée. Les ressources étaient limitées, et les rituels avaient beau se construire peu à peu, la conteuse n'avait pas des pages et des pages cachées sous son joli nez. Comment ferait-elle, si un jour il n'y avait plus de pages à conter ? Comment les images prendraient-elles vie, si la blonde ne pouvait plus articuler leurs envies ? Des questions qui se glissèrent dans la tête de la réceptionniste pour finalement prendre tellement de place qu'il lui fallait une solution. Solution simple, qui pouvait pourtant lui attirer quelques ennuis. Arrachant des petits bouts de papiers à toute la paperasse à laquelle elle ne trouvait aucun intérêt, la physicienne s'était mise à écrire. Des histoires qui revenaient dans sa tête comme des évidences. Souvent, c'était la voix de son père qui lui dictait les mots à coucher sur le papier. Sourire nostalgique au coin des lèvres, elle laissait le crayon prendre les notes, sans réaliser les brèches que peu à peu elle ouvrait.

À pas de loup, elle profitait de la nuit pour glisser les notes et les histoires sous la porte de la charmeuse de mots. Pour elle, tout devait s'arrêter là, ou plutôt, continuer comme ça. La brune n'est pas du genre à s'imaginer l'avenir et visiblement, pas forcément capable de mesurer les conséquences de ses actes non plus. Trop perchée dans sa propre réalité, la possibilité que ce soir, la blondinette s'avance vers elle, ne lui avait jamais traversé la pensée. Mouvement de recul un peu incontrôlé, elle laisse ses grandes billes brunes se perdre dans les yeux de celle dont la voix l'apaisait.

Est-ce qu'elle savait ? Est-ce qu'elle avait vu la brune glisser l'un des papiers ? Sans un mot, elle écoute la voix qui ne conte plus une histoire, qui commence plutôt leur histoire. Lui indiquant son prénom, Leia perd son air blasé et perdu pour lui offrir un sourire, maladroit, certes, mais un sourire quand-même. « Leia. » et puis elle ajoute, avec la voix d'Anakin dans la tête. « Batgirl, si tu préfères. » Toujours aussi mal à l'aise avec les interactions sociales, elle attrape la main de Cameron, sans doute un peu trop doucement, sans doute pas assez fermement. Elle a oublié tous ces trucs, et tente de faire comme elle peut pour qu'on s'en rende pas trop compte. Puis elle continue, sans doute pour entendre un peu plus la voix de la blonde, continuer à la voir remplir sa tête pour ne pas avoir à s'écouter elle-même. « Tes histoires sont très belles, tu leur donnes vraiment une vie. » Sa main s'élève pour crayonner entre elles. « Quelque chose de très imagé, très vrai. Je pense que les enfants dorment bien, grâce à toi. » Très factuelle, toujours trop rationnelle, Leia justifie ses mots pour leur donner un sens, du sens. « J'espère que tu continueras encore longtemps, à raconter des histoires. » Encore un sourire maladroit, et puis elle lui dit pas, mais elle le pense un peu, pas que pour les petits, qu'elle se dit, pour moi aussi.